Tour de France - Didier Rous : «Même si Kévin Vauquelin perd un peu de temps...»
Cette 9e étape du Tour de France 2025 a vu la victoire de Tim Merlier (Soudal Quick-Step), le champion d'Europe, qui a devancé au sprint, pour la deuxième fois sur cette Grande Boucle, le puissant sprinteur italien Jonathan Milan (Lidl-Trek) et le Belge de la formation Lotto, Arnaud De Lie. Présent dans le final de cette étape, le sprinteur français Arnaud Démare (Arkéa B&B Hotels) se classe 13e à Châteauroux, loin de ses espérances évidemment À la veille d’une étape importante pour le classement général, le chouchou des Français, Kévin Vauquelin, est 3e de ce dernier. Le directeur sportif de l'équipe Arkéa B&B Hotels, le Français Didier Rous, s'est longuement exprimé à notre micro de Cyclism'Actu sur les ambitions de Kévin Vauquelin pour le reste de ce Tour de France.
Vidéo - Didier Rous, au micro de Cyclism'Actu
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"Il y a vraiment énormément de fatigue dans le peloton..."
Il [Vauquelin] est derrière vous, il a animé ce début de Tour de France, et on est le 14 juillet… il doit gagner ?
Il doit gagner ? Je dirais que toutes les étapes sont bonnes à gagner. Que ce soit le 14 juillet ou un autre jour, elles sont toutes difficiles à remporter sur le Tour de France. Il y a énormément de concurrence, on le dit toujours, toutes les équipes alignent leurs meilleurs coureurs. Pour l’instant, ça fait dix jours demain que le Tour est parti, ça commence à faire long. Il n’y a pas eu de repos. Je pense que mardi, tout le monde sera content d’avoir cette petite journée de repos. On le voit, même les équipes de sprinteurs aujourd’hui manquent de main-d’œuvre. Même les grosses équipes comme Visma, on voit que c’est compliqué pour elles aussi, pour faire des bordures et autres. Il y a vraiment énormément de fatigue dans le peloton. Et demain, c’est l’étape... Moi je dirais que ça va faire partie des plus difficiles de ce Tour. Déjà parce qu’il va faire chaud, et ensuite parce qu’il n’y a pas un mètre de plat. C’est montées et descentes toute la journée. C’est le genre d’étape qui peut être encore plus dure qu’une étape de haute montagne.
On vient de faire une interview avec Kevin, et ce qui frappe, c’est son autodérision. Vous comprenez ça ?
Je comprends, oui. Et quelque part, c’est ce qu’on recherche tous. L’idée, c’est de ne pas lui mettre de pression, de vivre au jour le jour. On va voir comment ça va se passer, jour après jour. C’est aussi une manière de sortir de la pression. Nous, on ne lui en met pas, on n’en met pas à l’équipe, ni à aucun autre coureur. Alors oui, en course, un peu, parce qu’il faut être placé, il y a des endroits stratégiques. Mais tous, autant qu’ils sont, tiennent leur rôle, et ils sont présents là où on les attend.
"C’est sûr que s’il continue comme ça, sportivement, ce serait énorme..."
Si vous, Didier Rous, deviez donner un conseil à Kevin Vauquelin pour ce 14 juillet, ce serait quoi ?
Le conseil qu’on peut – et qu’on va – lui donner, c’est que ça va être une étape où il va falloir vraiment s’accrocher. Il y aura sûrement des moments difficiles, autant physiquement que psychologiquement. Mais aujourd’hui, vu sa condition, tout va bien, donc il n’y a pas de raison que ça se passe mal demain. Le message, c’est simple : fais ton étape, donne tout, et on verra bien ce qu’il se passera. À partir de maintenant, tout ce qui arrive, c’est du bonus. Même s’il perd un peu de temps, ce n’est pas grave. Il y aura d’autres occasions, d’autres étapes, et il a les capacités pour en gagner une. Demain, il peut très bien y avoir une explication entre les costauds du peloton, c’est possible. Rien n’est écrit à l’avance. C’est pour ça qu’il faudra être attentif, vigilant, et surtout bien analyser la stratégie des autres équipes.
Si Kevin termine encore au sommet du Mont-Dore en 3e position au général, vous vous dites quoi ?
Qu’il aura fait encore une super journée, ce serait une de plus, et franchement, il n’y aurait rien à redire. Comme je le dis depuis le début – et ce n’est pas de la langue de bois – le Tour de France, c’est dur. Très dur. Il y a des cols extrêmement exigeants, et Kevin, aujourd’hui, n’a encore jamais fait d’étape de montagne sur le Tour avec les meilleurs. C’est pour ça qu’on avance au jour le jour. On verra ce qui se passe, aussi simplement que ça. Il lui manque encore de l’expérience, des repères à ce niveau-là. On ne peut pas se projeter trop loin. Il faut vivre au jour le jour.
Et si jamais il tient, tant mieux ! Et s’il craque, eh bien… c’est comme ça, c’est la vie. Derrière, il y aura encore des étapes où il pourra s’exprimer. On est venu sur ce Tour avec l’objectif de gagner une étape, parce qu’on savait dès le départ qu’on avait l’équipe pour, notamment avec Kevin. Aujourd’hui, le fait qu’il soit 3e au général, ça nous bloque un peu. Je vous pose la question : qui se souvient spontanément de celui qui a terminé 3e du Tour l’année dernière ? Pas grand monde. Alors qu’une victoire d’étape, ça, on s’en souvient. Maintenant, s’il continue à ce niveau-là, sportivement c’est évidemment une énorme perf. Rien que les 9 ou 10 premiers jours qu’il a faits, c’est déjà du très, très, très haut niveau. Il est avec les meilleurs du Tour, ceux qui visent le général, et il a été dans le match quasiment tous les jours, sauf sur les trois étapes de sprint. Ça reflète bien le niveau qu’il a actuellement.
Tu es surpris de tout ça ?
Surpris ? Non. Parce que Kevin, c’est un très très bon. L’an dernier, tout le monde disait : "Un jour, le général du Tour, pourquoi pas." Mais avant ça, il faut poser les bases : être présent sur les étapes avec les plus costauds, passer les étapes de montagne, les contre-la-montre... Et là, il n’a plus rien à prouver : il est capable de jouer avec les meilleurs. Il reste maintenant les grandes étapes de cols. Une semaine, il l’a déjà tenue, il l’a prouvé en Suisse. Maintenant, c’est une question de franchir les étapes, une par une.
Tu es prudent… mais tu as envie de voir ?
Bien sûr que j’ai envie de voir ! On a tous envie de voir. Mais voilà, on y va petit à petit, sans pression, et on verra la suite.

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