INTERVIEW - Jakob Sodverquist : «Le pilotage, les réflexes, tout ça vient du VTT»
Après une saison couronnée de succès chez les Espoirs, avec notamment un titre de Champion du Monde Espoirs du contre-la-montre, Jakob Söderqvist va entamer sa première saison chez les Elites en WorldTour avec la Lidl-Trek. Lors du Media Day de son équipe ce vendredi 12 décembre, le Suèdois a fait un point sur ses objectifs et la popularité de son sport dans son pays natal. A long terme, il évoque Paris-Roubaix comme un de ses principal objectif. Cyclism'Actu était présent sur place pour recueillir ses propos.
Vidéo - Jakob Söderqvist au micro de Cyclism'Actu !
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"En Suède, quand on pense sport d’endurance, on pense plus facilement au ski de fond"
Tu dis essayer de ne pas trop y penser, mais tu sembles porter une certaine responsabilité en tant qu’ambassadeur du cyclisme suédois. Comment le vis-tu ?
Oui, d’une certaine manière. Aujourd’hui, je suis pratiquement le seul cycliste suédois à ce niveau, et le cyclisme reste un sport assez petit chez nous. Il a été plus important par le passé, puis il est un peu tombé dans l’oubli. J’aimerais contribuer à lui redonner de la visibilité, notamment dans les médias, et être présent sur les courses que les Suédois regardent. Si je peux aider à reconstruire ce sport, ça aurait énormément de sens pour moi.
Justement, pourquoi penses-tu que le cyclisme a perdu en popularité en Suède ?
C’est difficile à expliquer par une seule raison. C’est plutôt une tendance générale. En Suède, quand on pense sport d’endurance, on pense plus facilement au ski de fond, qui est très ancré culturellement. En Belgique, par exemple, le cyclisme vit encore beaucoup grâce à son histoire. En Suède, il y a eu une époque où des coureurs faisaient de grands résultats, notamment sur les grandes classiques, il y a une quarantaine d’années. Le dernier exemple marquant reste Magnus Bäckstedt à Paris-Roubaix, mais c’était ponctuel. Avec le temps, le cyclisme a disparu des médias, et aujourd’hui beaucoup de gens ne pensent même plus qu’il est possible d’en vivre professionnellement.
"Avec le temps, je pense pouvoir aussi viser de bons résultats en courses par étapes"
Le fait d’avoir des coureurs norvégiens et danois dans l’équipe, est-ce que ça t’aide ?
Oui, clairement. La Scandinavie, c’est ce qu’il y a de plus proche de chez moi dans le peloton. On partage une culture similaire, et même la langue est plus facile à comprendre et à apprendre. Ça m’aide à me sentir plus à la maison, surtout dans un environnement où l’anglais est souvent la seule langue de travail.
Tu es le premier cycliste suédois à avoir remporté un titre mondial chez les hommes. T’es-tu senti comme un pionnier ?
Honnêtement, pas vraiment. Je ne me suis jamais vu comme quelqu’un qui porte quelque chose de plus grand que lui. Je connais l’histoire du cyclisme suédois, mais je ne l’ai pas étudiée en profondeur. Je viens du VTT, j’ai arrêté assez jeune, et mon rapport au cyclisme sur route s’est construit progressivement. Aujourd’hui, j’essaie surtout d’être moi-même. Tant que je prends du plaisir et que je reste motivé, je pense que les choses peuvent évoluer naturellement et, peut-être, contribuer à une nouvelle vague pour le sport.
Comment vois-tu la suite de ta carrière ?
Cette saison m’a beaucoup appris sur mon profil. Le contre-la-montre restera toujours une spécialité pour moi, c’est quelque chose de naturel. Mais je sais aussi qu’il me faudra beaucoup plus de temps pour devenir un vrai coureur de classiques complet. Ça demande énormément d’expérience : comprendre le peloton, les parcours, les conditions, la culture des courses. Avec le temps, je pense pouvoir aussi viser de bons résultats en courses par étapes, peut-être même sur des courses d’une semaine.
"L'objectif principal reste les classiques"
As-tu déjà un programme défini pour la saison prochaine ?
Pas encore de manière définitive. Il y a beaucoup de discussions, beaucoup de facteurs à prendre en compte. L’objectif principal reste les classiques, avec une préparation similaire à celle de cette saison, même si nous adapterons certains stages.
Et les Grands Tours, est-ce une option ?
C’est quelque chose que nous avons envisagé, mais rien n’est décidé. Il y a beaucoup de paramètres : la préparation, les besoins de l’équipe, le niveau global des coureurs. La listede prétendants pour les Grands Tours est longue, donc on prendra la décision au bon moment.
"Le VTT et la route sont deux disciplines différentes, mais avec une base cognitive assez proche"
Toi qui vient du VTT, comment as-tu réussi la transition de cette discipline vers le contre-la-montre, un effort très différent ?
Je n’ai jamais été obsédé par l’idée de devenir le meilleur vététiste possible. Quand j’ai découvert le vélo de contre-la-montre, j’ai tout de suite senti que c’était fait pour moi. J’ai toujours été bon pour gérer le rythme, le momentum, trouver une vitesse constante. Les accélérations brutales ou les efforts explosifs ne correspondaient pas vraiment à mon profil. En contre-la-montre, j’ai rapidement compris que je pouvais être plus performant que je ne l’avais jamais été en VTT.
Ton passé en VTT t’aide-t-il encore aujourd’hui, notamment sur des courses comme Paris-Roubaix ou Strade Bianche ?
Oui, énormément. Le pilotage, la vision, les réflexes, la capacité à lire le terrain, tout ça vient du VTT. Bien sûr, le peloton est un apprentissage différent, mais mentalement, la logique est la même : être efficace, économiser de l’énergie, trouver la meilleure trajectoire. Ce sont deux disciplines différentes, mais avec une base cognitive assez proche.
Parmi les classiques, Paris-Roubaix semble parfaitement correspondre à ton profil. Qu’en est-il du Tour des Flandres ?
Roubaix est sans doute la plus naturelle pour moi. Mais à terme, toutes les classiques pavées peuvent devenir des objectifs. Si un jour j’ai le rôle de leader pour jouer la victoire, j’en serais très reconnaissant. Pour l’instant, je me concentre surtout sur Roubaix, mais j’aimerais aussi devenir de plus en plus compétitif sur les Flandriennes comme le Tour des Flandres ou l’E3.

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