Les carnets secrets de - Marc Fayet : «Le petit Van der Poupou... »

"Nous avons assisté au triomphe du petit van der Poupou"

Parfois on voit les autres voler, ceux qui, une jambe au-dessus, vous passent sans un regard. On a beau les observer, scruter leur développement, la grosseur de leur mollet, le dessin de leur muscles, l’épaisseur de leurs veines et la qualité de leur vélo, impossible de déceler l’élément qui pourrait justifier une telle suprématie. Même avec l’application scanner récemment intégrée à votre téléphone et que vous avez rapidement présenté devant l’engin qui vous doublait, vous n’y avez même pas trouvé la trace d’un moindre petit moteur minuscule ou d’un roulement à billes suspect. Vous ne pouvez alors que vous rendre à l’évidence que vous êtes un cran au-dessous et pour les plus dépressifs d’entre vous, que vous n’êtes que de pauvres nullards avec votre bécane à 5 000 balles (Mais avec un vélo à 12 000 ça marche aussi).

Et ce n’est rien par rapport à ce type en short et Basket, sac Déliveroo sur le dos et biclou pourri sur l’anneau de Longchamp qui vous passe tous les 4 tours en sifflant. Ce n’est pas que dans le matériel que ça se situe, pas que dans l’aspect physique non plus, tenue élégante et jambes rasées-bronzées-huilées, non ça se situe ailleurs mais où ? C’est ce que nous allons tenter de découvrir. Prenons pour exemple l’excellente initiative de l’UCI d’avoir non seulement regroupé sur une même période les championnats du monde de toutes les disciplines cyclistes mais de plus d’y avoir intégré les catégories para-cyclistes. Bienfaits de l’inclusion qui incite la société à intégrer en son sein avec le minimum de discrimination toutes les minorités en l’occurrence celles porteuses de handicap, pour les mêler aux valides bien-portants afin d’entretenir cette notion de vivre ensemble, valeur incontournable d’aujourd’hui.

Une des plus belles démonstrations eut lieu dimanche 6 août lorsque sur le parcours en ligne nous avons assisté au triomphe du petit van der Poupou, lâchant ses compagnons à 20 kms de l’arrivée, qui avaient beau regarder ses mollets, ses veines, son équipement, ils n’ont pas compris quel était l’élément supplémentaire qui lui permettait de les abandonner alors qu’ils représentaient le gotha cycliste eux les plus forts parmi les plus forts. Mais il faut saluer le mérite de tous ceux qui eurent le privilège de courir derrière ces champions, de les côtoyer jusqu’à l’entrée du circuit, bienfaits de l’inclusion une fois encore où cette horde de coureurs ayant une jambe en moins ou pas de jambes du tout eut le droit d’escorter les 20 coureurs valides jusqu’à Glasgow pour les laisser s’expliquer entre eux. Mais ce jour-là Mathieu l’avait cette jambe en plus. 

Un autre champion qui avait une jambe en plus c’était ce pistard espagnol Ricardo Ten Argiles, médaille d’Or de l’omnium et du Scratch le lundi 7 août, qui pourtant n’en avait qu’une de jambe face à ses adversaires dont la majorité en avaient deux même si elles pouvaient être incomplètes. 

"Qu’on ait deux bras ou pas, qu’on ait la jambe ou pas, quand on est champion c’est avec la tête"

Un autre phénomène ce coureur qui à l’âge de 47 ans remporte la 4^ème médaille d’Or de sa carrière. Vous me ferez remarquer que 4 médailles d’Or à 47 ans, ce n’est pas exceptionnel non plus. Oui mais il y a quelque chose que j’ai oublié de préciser, c’est qu’avant d’être ce champion sur piste unijambiste il était nageur et qu’à ce titre il en a eu une trentaine de titres et de médailles et dans tous les métaux. Pas de doute, cet Espagnol qui était au-dessus de l’eau est également au-dessus du lot comme le Néerlandais et au nom de la fraternité sportive qui abolit les frontières ils pourraient se prendre dans les bras pour preuve du respect mutuel des champions quelle que soit leur discipline et leur différence. Mais ils ne pourront pas l’avoir cette accolade et c’est bien dommage ! Ce n’est pas parce qu’ils ne veulent pas, pas par soucis de ne pas se mélanger, non c’est juste que le nouveau pistard et ancien nageur Espagnol n’a pas de bras du tout. Et c’est là qu’on se dit que pour remporter ses 30 médailles dans l’eau, il devait bien être un bras au-dessus des autres !? Non ? Conclusion : Qu’on ait deux bras ou pas, qu’on ait la jambe ou pas, quand on est champion c’est avec la tête.