ITW - Thomas Lebas : «Un métier qui me passionne»

 

Thomas Lebas n'est pas forcément connu du grand public. Mais ce coureur, pensionnaire de la formation Brigestone Anchor, une équipe continentale, dispute actuellement le Tour du Japon (2.1 au calendrier UCI Asia Tour) et est l'un des grandissimes favoris pour le général. Cyclism'Actu a voulu en savoir un peu plus sur ce coureur qui brille sur les courses asiatiques (vainqueur du Tour d'Hokkaido en 2013 notamment). On l'a contacté juste avant qu'il prenne le départ du prologue (69ème à 21 secondes du premier). Entretien.

 

Tout d'abord, comment allez-vous ?

Je vais bien merci , je viens d'arriver au japon il y a deux jours pour y disputer le Tour du Japon suivi du Tour de Kumano après avoir passé un mois en France chez moi où je me suis préparé en disputant notamment la Roue Tourangelle et le Tour de la Somme.

 

Cette année, vous arborez pour la troisième saison d'affilée, le maillot de l'équipe Continentale Bridgestone. Que pouvez-vous nous dire sur cette équipe peu connu en France ?

 C'est un équipe japonaise continentale qui existe depuis 50 ans elle est basé a Saitama, une ville en périphérie de Tokyo (100 km au nord), le sponsor principal Anchor est la branche vélo de l'entreprise Bridgestone.

 

Quand elle vous a recruté, elle vous a montré le souhait de devenir « la meilleure équipe asiatique ». Où elle est en trois ans après ?

Le but premier n'était pas de devenir a proprement parler la meilleure équipe asiatique mais surtout de profiter de l'expérience de coureurs européens et des courses en Europe pour aguerrir  les coureurs japonais et leur permettre un jour d'intégrer le plus haut niveau dans des équipes européennes. La plupart des coureurs ont progressé mais ce sera du travail sur le long terme. Changer les habitudes et les mentalités ne peut pas se faire en quelques années.

Vous allez prendre le départ, ce dimanche, du Tour du Japon. Une course qui vous réussit puisque vous avez terminé à deux reprises 4ème. Quel est votre objectif cette saison ?

Le Tour du Japon est une course qui convient bien au profil des coureurs de Bridgestone. Le parcours est difficile et nous avons plusieurs coureurs capable de bien faire avec entre autre Miyataka Shimizu, Damien Monier ou moi meme. L'objectif est clairement de gagner le général, c'est un peu le rendez vous de l'année pour une équipe japonaise.

 

Tout devrait se jouer lors de la 4ème étape, un chrono en côte. Non ? Parlez nous du parcours assez particulier avec deux jours de repos en une semaine de course.

La 4eme étape est la montée du Mont Fuji, le col le plus dur que j'ai eu a monter durant ma carrière, 11km à environ 15 % de moyenne avec des passages a plus de 20% !! Ce n'est pas un clm mais bien une course en ligne de 11km avec départ au pieds du col, une particularité du Tour du Japon !

Cependant, les autres étapes sont très difficiles aussi  et le général se décante toujours avant le mont Fuji qui ne sert que d'explication entre les coureurs déjà placés. Il faut donc impérativement arriver au matin de cette étape en bonne position au général .

Le Tour du Japon est une course exigeante avec des étapes en circuit difficiles qui nécessitent de rester concentré tous les jours pour jouer le général.
Deux journées sont consacrées au transfert pendant la semaine, c'est aussi un point a gérer, il faut rester dans la course mentalement et aller rouler pour ne pas perdre le fil au risque de connaitre un départ difficile le lendemain.

 

Quels sont vos rivaux sur ce Tour du Japon ?

Le danger viendra principalement des grosses équipes présentent comme Lampre ou Drapac ou encore Vini Fantini Nippo.

 

Le Tour du Japon est-il très suivi là-bas ? Est-ce un « grand évènement sportif » ?

Le Tour du Japon est l'événement de l'année pour le monde du vélo japonais. Cependant , le grand public se tourne plus vers la piste et le kerin . Mais on sent tout de même un engouement  de la part du public , surtout le dernier jour à Tokyo.

Quel est la différence entre une course japonaise comme celle-ci et une course européenne ? Est-ce une course plus ouverte que ce qu'on peut voir en Europe ? Est ce que la voie des calendriers autres que celui de l'Europe Tour peut mener au plus haut niveau ?

Les courses asiatique sont moins stéréotypées que les courses pro tour européennes. Les etapes en circuit type "championnat " tous les jours y sont pour beaucoup.

Le niveau est en constante augmentation depuis 3ans , date de mon arrivée mais il est encore clairement un ton en dessous du niveau européen , surtout au niveau de la densité globale. Il y a beaucoup de disparités de niveau dans le peloton japonais.

 Ce ne sont pas pour autant des courses faciles , on voit que les équipes européennes qui se rendent la bas n'écrasent pas tout non plus !! L'année dernière l'équipe lampre, seule pro tour au depart , est rentrée bredouille du Tout du Japon.

Il y a des coureurs de talent en Asie , notamment des sprinteurs , mais malheureusement la plupart des équipes européennes recrutent le plus souvent par les voies plus "classiques". Certains coureurs asiatiques ont aussi du mal a quitter leur confort pour tenter l'aventure en Europe. Mais je reste persuadé que certain coureurs asiatiques ont largement le niveau pour évoluer dans des équipes conti pro ou pro tour en Europe, il y en a déjà quelques uns et je pense qu'il y en aura de plus en plus a l'avenir.

 

Avez-vous été en contact avec des équipes professionnelles ?

J'ai été en contact avancé avec quelques équipes du temps ou je courrai en France en amateur a l'AVC AIX. J'étais notamment stagiaire chez Cofidis en 2008 mais cela ne c'est pas fait. Je n'ai pas su saisir ma chance et me vendre a ce moment la. Maintenant que je suis sortit du circuit classique je n'ai plus de contact avec les équipes française. Je n'en cherche pas non plus. J'ai trouvé mon équilibre chez bridgestone et je me sens bien dans cette équipe. Je bénéficie d'un calendrier adapté et d'un certain " poids " dans cette équipe.

 

Qu'est ce qu'il vous manque pour intégrer l'élite mondial ?

Actuellement mon calendrier est plus tourné vers l'Asie pour des raisons d'invitation d'une part, il est difficile pour nous d'etre invité sur les grosses courses en europe , et marketing d'autre part, Bridgestone Anchor n'exportant pas en europe ses vélos. J'ai donc tres peu l'occasion de me mesurer au autre en europe sur des terrains a ma convenance.

J'ai déjà eu de petits résultats sur des grosses courses comme le Tour d'Oman 2012  (9eme) mais je pense que je n'ai pas le profil recherché par la plupart des équipes européennes , a savoir relativement rapide au sprint . Énormément de course en Europe se terminent au sprint massif ou en petit groupe. Et il faut reconnaitre que mes chances sont minimes dans cette configuration. Mon âge ne joue pas en ma faveur non plus j'ai 29 ans et les équipes vont se tourner vers des coureurs plus jeunes. Mais ce sont des raisons que je comprend et que j'accepte. Comme je l'ai dit j'ai trouvé un équilibre en Asie , j'évolue sur des terrains et a un niveau qui me correspond et je saisis ma chance en Europe des que j'en ai l'opportunité comme sur le Tour d'Oman 2012 par exemple.

 

Vivez-vous du cyclisme ?

Bridgestone est une équipe continentale de 3eme division au même titre que la pomme marseille ou big mat auber. J'ai donc un statut professionnel au niveau de la LNC en France et a l'UCI.

 

Vous voyagez beaucoup pour disputer des courses dans les quatre coins du monde. Cela est-il difficile à vivre ? (loin de la famille, etc)

Le fait de voyager beaucoup et très loin implique des périodes de récupération plus longues que les coureurs qui courent tous les we mais qui sont rentrés chez eux des le dimanche soir.

J'alterne donc des périodes loin de la maison assez longues mais également des périodes de repos et de préparation chez moi assez longues aussi.

Il est sur que ce n'est pas toujours évident de partir plus d'un mois de chez soi, mais j'ai la chance de faire un métier qui me passionne et qui ne durera pas éternellement alors j'essaye de profiter un maximum et de faire les choses a fond pour n'avoir aucun regret.

 

Propos recueillis par Renaud Breban.