INTERVIEW - Mauro Gianetti : «Pogacar, ce n'est pas qu'un champion, mais un copain»

Par Cyclism'Actu le 14/12/2025 à 20:20

INTERVIEW - Mauro Gianetti : «Pogacar, ce n'est pas qu'un champion, mais un copain»
INTERVIEW
Photo : @CyclismActu / @UAETeamEmirates

Ce samedi 13 décembre se tenait à Benidorm, en Espagne, le Media Day de la meilleure équipe du monde, la formation UAE Team Emirates-XRG. À l’aube d’une nouvelle saison, l’équipe émiratie a dévoilé le calendrier de ses principaux leaders, comme Joao Almeida, Isaac Del Toro et, évidemment, l’irrésistible champion du monde, Tadej Pogacar. Présent à Benidorm, le manager général de l’équipe UAE Team Emirates-XRG, le Suisse Mauro Gianetti, s’est confié dans une interview exclusive pour Cyclism’Actu. L’homme de 61 ans est revenu sur la saison monumentale de son équipe en 2025, sur les choix de Tadej Pogacar quant à son programme de courses, mais aussi sur l’intégration des nouveaux coureurs, tels que Benoît Cosnefroy, le Français transfuge de la formation Decathlon AG2R La Mondiale à l’intersaison.

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"On a obtenu ça avec beaucoup de travail"

Bonjour Mauro. Comment ça va ? On se retrouve ici à Benidorm, premier stage de la saison. La prépa pour 2026 a commencé ?

Oui, elle a commencé. D’ailleurs, chaque année, on a l’impression qu’on commence plus tôt, mais finalement, on ne sait pas si on commence plus tôt ou si on termine toujours plus tard. Mais la famille a grandi et, après une année exceptionnelle comme en 2025, on part avec beaucoup de motivation et beaucoup de concentration. C’est un bon moment. C’est le seul moment où toute l’équipe est ensemble, tous les coureurs, et aussi une grande partie du staff est là. C’est un très bon moment, très intense, mais très intéressant.

 

Justement, pour revenir sur cette saison 2025, qui a été historique, 97 victoires, dont le Tour de France, trois Monuments et tout ce qui va avec, comment vous l’analysez ? C’est une grande satisfaction, je suppose ?

Oui, c’est une satisfaction énorme, parce que c’est le rêve d’une vie de faire quelque chose d’exceptionnel. Et c’est sûr que 97 victoires, trois coureurs dans le top 5 du monde, Tadej (Pogacar, ndlr) qui est en train d’écrire une page incroyable du cyclisme, la victoire du classement par équipes, c’est beaucoup de choses en une seule fois. C’est un moment extraordinaire, et c’est maintenant qu’il faut qu’on reste humbles, qu’on reste quand même concentrés et qu’on ne se prenne pas trop la tête. C’est bien, mais on a obtenu ça avec beaucoup de travail, avec beaucoup de dédication, beaucoup de passion. Et donc, c’est le moment idéal pour dire : OK, maintenant, qu’est-ce qu’on doit faire ? Comment on peut faire pour rester où on est, essayer d’améliorer ? Il faut regarder, bien être content, mais il ne faut pas s’asseoir là-dessus.

 

Justement, on a parlé un peu de Tadej, qui a réalisé encore une saison 2025 énorme. La saison 2024 était elle aussi exceptionnelle. Je voulais revenir sur un passage qui, pour moi, a été important dans sa carrière. C’est la transition entre 2023 et 2024. En 2023, il fait quand même une très belle saison, mais il perd le Tour. Et on sent qu’il y a eu un gros changement et qu’en 2024, il est revenu beaucoup plus fort. On a appris qu’il avait eu un changement de coach, qu’il y avait pas mal de choses qui avaient changé. Est-ce que vous pouvez un peu revenir sur ce processus et tout ce qui a été fait pour encore qu’il s’améliore ?

Oui. Mais vous savez, déjà, c’était une année un peu compliquée : il est arrivé au Tour (en 2023) sans être dans la condition qu’il aurait dû avoir à cause de la chute (à Liège-Bastogne-Liège en 2023). Et surtout, Vingegaard, il est costaud. On ne peut pas penser battre Vingegaard si on n’est pas à 100 %. En plus, c’était aussi le moment pour lui de changer quelque chose, parce qu’on ne peut pas faire toute la vie les mêmes choses, et toujours le même type d’entraînement et de nutrition. Il fallait quand même trouver de nouvelles motivations et changer. Pas parce que ce qu’il avait fait avant n’était pas bien, puisqu’il avait quand même gagné deux Tours et beaucoup d’autres choses en étant très jeune. Mais à un moment donné, quand il y a des choses comme ça, des moments comme ça, la meilleure chose, c’est de changer complètement pour avoir simplement de nouvelles motivations, donner au corps aussi de nouvelles stimulations, mais plutôt mentales. Et là, il est reparti avec un nouvel équilibre, et maintenant ils se sentent vraiment à nouveau confiants. Mais on n’arrête pas de changer, de stimuler, parce que ce qu’il a fait en 2024, il ne l’a pas fait de la même manière en 2025. On a compris qu’il faut continuer à donner une petite évolution, ou quand même un petit changement, pour ne pas être répétitif.

 

"Tadej Pogacar apporte beaucoup de choses..."

Justement, c’est dans cette lignée-là qu’en 2026, si on a bien compris son programme, il fera notamment le Tour de Romandie, le Tour de Suisse, qu’il n’a pas encore fait. Donc, c’est encore une fois des nouvelles choses à apporter pour continuer à le stimuler, en fait ?

Oui, c’est important. C’est important pour lui, c’est important pour l’équipe, c’est important aussi pour les autres coureurs d’avoir d’autres coureurs autour de lui, pas toujours les mêmes, donc changer de compétition. D’ailleurs, le Tour de Suisse et le Tour de Romandie sont des courses extraordinaires. Je le dis comme Suisse, mais pas parce que je suis Suisse. Ce sont des courses historiques qu’il a toujours dit qu’il voulait faire. En plus, l’année passée, on est passés en Suisse pour visiter un de nos partenaires, et il a adoré le coin. Il a dit : « Je dois courir ici, je veux venir faire le Tour de Suisse, le Tour de Romandie ». Et donc, c’est un nouveau challenge avec une motivation incroyable pour faire ces deux nouvelles courses.

 

L'interview de Tadej Pogacar lors du media day samedi 13 décembre !

 

Justement, en tant que grand leader de cette équipe, est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu’il apporte à ses coéquipiers, notamment à des coureurs, lui aussi est très jeune, mais à des coureurs encore plus jeunes, je pense à des Pablo Torres, à des Isaac Del Toro, à des Adrià Pericas qui arrivent dans l’équipe. Qu’est-ce qu’un grand leader comme lui, un modèle, apporte à ces coureurs-là ?

Il apporte beaucoup de choses. Déjà, la professionnalité, c’est le plus sérieux. Il travaille parfaitement, il suit la nutrition, il suit les indications. Il passe des journées à faire des tests de matériel, à faire des tests de position, à aller voir les parcours. Donc, c’est un exemple de professionnalité. Ce n’est pas l’exemple « ah, j’ai la classe, je laisse faire ». Non, et donc c’est pour ça que c’est important pour les jeunes d’arriver à voir que le numéro un au monde, le coureur qui est en train d’écrire une page incroyable du cyclisme, est concentré sur son boulot. Il le fait avec le sourire. Il ne prend jamais ce qu’il est en train de faire comme quelque chose qu’il doit faire. Non, c’est quelque chose qu’il veut faire. Et ça, c’est le point important. Ça, c’est le truc important. Il fait tout ce qu’il faut faire, mais il le fait avec l’envie de le faire, pas le poids du « je dois faire ci, ça ».

Et ça, c’est le meilleur exemple qu’il peut amener. Et en plus, il adore ses coéquipiers. Il adore Del Toro depuis qu’il est arrivé ici. Il aimerait l’avoir toujours avec lui. Il parle beaucoup. Ils se téléphonent quand ils ne sont pas sur les mêmes courses. Il donne des conseils. Il discute. Donc, il a un vrai copain. Ce n’est pas simplement un grand coureur, un champion. Non, non, non. C’est un copain. C’est un vrai copain qui aime bien ses copains. Et s’il peut faire quelque chose pour les copains, il les aide pour n’importe quoi. Et ça, c’est génial. Ça, c’est énorme.

 

"Benoît Cosnefroy ? Un coureur de talent incroyable"

Pour élargir un peu et revenir à l’équipe en général, vous avez fait un Mercato 2025-2026 assez calme en soi. Trois départs, trois arrivées. Les arrivées, c’est Benoît Cosnefroy, Kevin Vermaerke et Adrià Pericas. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce Mercato, pourquoi avoir fait aussi peu de changements ?

Déjà, l’équipe est bien. Les coureurs qu’on a choisis et qu’ils ont choisis de venir avec nous dans le passé sont des coureurs qui se sont démontrés de très haut niveau. Mais surtout, ce sont des personnes qui sont bien avec nous. Ce ne sont pas simplement des coureurs de haut niveau qui performent bien, mais ce sont des personnes qui ont créé une ambiance, qui ont amené quelque chose d’important à l’équipe. Et ils travaillent eux aussi pour garder cette très bonne ambiance qu’on a dans l’équipe. Et donc, pourquoi faudrait-il changer ? Rafal Majka a terminé sa carrière.

Quand il a décidé de partir, on avait deux places. Et il y a un jeune qui a grandi avec nous. Donc, ces deux places, on les a remplacées par deux coureurs qu’on pense capables d’apporter beaucoup à notre équipe, notamment Benoît Cosnefroy. C’est un coureur de talent incroyable. C’est exactement le coureur qu’il nous fallait, parce que c’est un puncher, une alternative. Tadej fait tout, mais s’il n’y a pas Tadej, on n’a pas le vrai puncher comme lui. Et lui, c’est quelqu’un qui peut vraiment faire beaucoup de choses dans n’importe quelle course. Il a un niveau extraordinaire. Et au niveau sportif, il avait cette place dans notre équipe. Mais surtout, au bout de trois jours, on avait l’impression qu’il était toujours avec nous. C’est un mec extraordinaire. Tout le monde est content qu’il soit venu. Donc, j’espère et je suis assez convaincu que c’est un choix incroyable pour nous, parce qu’on a une personnalité, une personne extraordinaire, pas simplement un très bon coureur. Et j’ai l’impression qu’il est aussi bien intégré dans l’équipe.

Kevin Vermaerke, c’est un autre coureur dont on avait besoin pour nous garantir un tout-terrain, quelqu’un qui peut être dans n’importe quelle course, être à disposition de l’équipe, soit en montagne, soit sur le plat pour rouler. Mais il a aussi la possibilité de se glisser dans les échappées et aller essayer de gagner des choses. C’est vraiment le type de coureur qui, dans notre équipe, a vraiment beaucoup de possibilités.

 

L'interview de Benoît Cosnefroy pour Cyclism'Actu

 

Pour revenir aussi dans le sens des départs, il y a eu le départ de Juan Ayuso. Hier, on était à la conférence de presse de Lidl-Trek. Il a eu un mot pour vous et pour l’équipe, qui tenait à s’excuser de certains propos, qui avaient peut-être un peu dépassé sa pensée. Est-ce que vous voulez lui répondre quelque chose ou pas du tout ?

On a écrit de belles choses avec Juan. On l’a connu dès qu’il était junior. On a fait de grandes choses ensemble. C’est un coureur extraordinaire. Il a beaucoup de classe. Vous savez, à 20 ans, on a la pression. Et des fois, c’est sûr qu’on est simplement content qu’il ait trouvé la dimension et l’équipe et qu’il puisse démontrer toute sa valeur, parce que c’est un coureur de grand talent. C’est pour ça aussi que c’était important de lui donner cette possibilité de s’exprimer dans l’ambiance qu’il préfère. Ça m’a fait plaisir, bien sûr, les mots. Je lui souhaite aussi tout le mieux parce qu’il le mérite.

 

Juste une petite vision sur 2026. Est-ce que vous pensez que ce sera possible de faire mieux en 2026 qu’en 2025 ?

Ça va être difficile. On peut toujours faire mieux. Il y a toujours la possibilité de faire mieux. Il faut travailler pour ça. Si on n’y croit pas, ça serait dommage.

 

Les 100 victoires, c’est un objectif ?

Vous savez, ce n’est pas simplement une question de numéros. C’est une question aussi d’image. Notre équipe a un but un peu différent. Ce n’est pas que les victoires. Nous, on veut motiver les gens à faire du vélo. On veut motiver les gens à avoir une idée aussi vis-à-vis de la pollution. Utiliser le vélo pour ne pas polluer. Utiliser le vélo pour se sentir mieux, pour passer du temps avec des copains. Le vélo, c’est un sport qu’on peut faire en discutant, père-fille, mère-fils, entre copains.

Pour nous, c’est aussi important. C’est un aspect important. Si on continue à mettre autant de gens comme on l’a fait dans les dernières 6-7 ans aux Émirats, il y a 10 ans, il n’y avait pratiquement personne qui faisait du vélo. Maintenant, il y a 2500 kilomètres de pistes cyclables, des milliers de personnes qui ont commencé à faire du vélo. Avoir un respect pour le vélo comme outil pour le travail, pour le bien-être, pour nous, c’est aussi une victoire très importante.

 

En tant que personne, que ce soit en tant que manager général de l’équipe ou que ce soit vous, Mauro Gianetti, qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour cette belle année 2026 qui arrive ?

Qu’est-ce qu’il faut me souhaiter à moi ? Simplement qu’on arrive à chaque fois sur la course et voir tous mes coureurs, tout mon staff avec le sourire et qu’ils soient contents d’être ici, travailler et faire partie de ce projet.

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