Philippe Gilbert : «Evenepoel... ses équipiers étaient trop faibles»
TransfertL'annonce du transfert de Remco Evenepoel chez Red Bull-BORA-hansgrohe a fait du bruit dans le monde du cyclisme. Après sept ans chez Soudal Quick-Step, la formation qui lui a permis de se révéler puis de devenir l'un des tout meilleurs cyclistes du monde, le Belge s'apprête donc à rejoindre l'équipe allemande, composée notamment du Slovène Primoz Roglic et de l'Allemand Florian Lipowitz, récent 3e du Tour de France 2025 à seulement 24 ans. Consultant pour le quotidien belge Le Soir, Philippe Gilbert s'est confié sur ce transfert surprenant au premier abord, mais qui répond à une logique économique et sportive.
Remco Evenepoel lors du Tour de France 2025
"Il avait fini par s'entourer de gens qui lui disaient oui"
Philippe Gilbert explique d'abord les raisons de ce transfert : "Remco a raison de sortir de sa zone de confort. Les moyens financiers seront tout autres. Je ne parle pas ici du salaire qu’il va percevoir mais des possibilités en recherche, développement, stages, qualité de l’encadrement, etc. Il disposera d’une base technique, technologique, plus solide et riche, nécessaire aux progrès qu’il recherche. J’ai l’impression que ces derniers mois, chez Soudal-Quick Step, il était avant tout arc-bouté sur ses acquis. Il avait fini par s’entourer de gens qui lui disaient oui, quelles que soient les circonstances, les choix à opérer".
Il poursuit : "Désormais, je pense qu’il va se retrouver un peu comme au début de sa carrière, lorsqu’il est arrivé chez Quick-Step (2019) et qu’il devait mériter sa place dans notre groupe. La saison prochaine, il devra se battre pour exister dans un collectif intrinsèquement plus fort que celui dans lequel il évoluait jusqu’ici. C’est déterminant ! S’il avait dû repartir de zéro sur un autre vélo, avec une autre marque, pour retrouver sa position parfaite en contre-la-montre, cela aurait constitué un retour en arrière préjudiciable. Ici, il garde tous ses repères, ce qui est énorme".
"Ses équipiers étaient trop faibles pour assumer un maillot jaune sur trois semaines"
Il évoque ensuite en détail la nouvelle formation du Belge : "BORA, tactiquement, c'est très bon. On l’a vu ces dernières saisons au Giro, avec le succès de Jai Hindley, ou tout récemment sur le Tour, avec des coups parfaitement joués. Cet aspect tactique développé, c’est ce qui manquait à Remco jusqu’ici. Il va faire face à des patrons sportifs capables de lui imposer des choix. C’est exactement ce dont il a besoin pour franchir un cap. Moi aussi, après six ans à la FDJ, je me sentais bien, j’étais dans une bulle de confiance, j’avais des équipiers solides, mais j’avais pourtant choisi de partir chez Lotto (2009-2011). J’avais alors dû refaire ma place, dans un autre environnement, plus compétitif. Et on a vu ce que cela a donné…".
Enfin, il explique que cette décision tient à ses ambitions sur le Tour : "Pour Remco, ce type de rupture volontaire peut relancer une carrière et ouvrir un nouveau cycle. Il se met en difficulté, tant mieux ! Il n’y a pas de miracle : sur les grands tours, les plus forts s’imposent. Aujourd’hui, battre Pogacar ou Vingegaard sur une épreuve de trois semaines, c'est très compliqué. Même avec un coup tactique, faire mieux que troisième sera difficile quand les deux ogres sont en forme. Le jour où l’un des deux, ou les deux, baisseront de pied, Remco sera le premier à pouvoir prendre la relève. Ses équipiers étaient trop faibles pour assumer un maillot jaune sur trois semaines. Chez Red Bull, s’il prend le maillot, il y aura des gars capables de rouler jusqu’à Paris pour le protéger".
Publié le par Noah VIGNAUD