TDF - V. Nibali et A. Contador, seuls au Monde ?

 

Le maillot jaune, Vincenzo Nibali, serein à l'arrivée de cette 8e étape du Tour de France à Gérardmer. Sur cette première étape des Vosges, Nibali a subi les premières attaques de son rival pour le classement général, l'Espagnol Alberto Contador. Et Nibali est resté dans sa roue « sans s'être réllement inquiété » comme il a pu le confier au micro de Cyclism'Actu. Quant au fait de s'être trouvé esseulé dans la montée vers Gérardmer, "cela ne m'a pas gêné" a expliqué Nibali. "J'aurais préféré avoir toute mon équipe autour de moi comme, par exemple, Jakob Fuglsang mais il n'était pas bien aujourd'hui. Cela arrive et j'espère pouvoir compter sur lui dans les jours à venir." 

 

 

Entre Sheffield, les pavés et des étapes jamais vraiment tranquilles, nous étions déjà dans le vif du sujet de ce Tour de France que les premières montagnes n'avaient pas été abordées. C'est maintenant chose faite. Même si cette cent-unième Grande Boucle n'a toujours pas vu un grand col, l'entrée dans les Vosges a offert de premiers pourcentages significatifs, une arrivée en bosse… et une explication entre leaders. Et pour ce premier test montagneux, Vincenzo Nibali a résisté. Enfin il perd 3''. Minime ! Surtout qu'on sait que Nibali préfère les allures régulières aux petites accélérations explosives dont Alberto Contador est capable et que ladite différence s'est faite quelques mètres avant la ligne.

« C'est une bonne journée pour moi. Ce n'était pas facile car c'était une arrivée pentue qui correspondait plus aux caractéristiques d'un coureur explosif comme Contador qu'aux miennes, alors je pense avoir très bien réagi aux attaques d'Alberto ». « La condition est bonne » affirme Nibali après l'arrivée au sommet pluvieux de La Mauselaine, à Gérardmer. Et c'est bien la réponse à la question que tout le monde se posait… Et se pose sans doute encore jusqu'à ce qu'on aborde les hauts sommets du Tour de France 2014. Si Nibali a fait la différence sur les pavés, de quoi est-il capable en montagne, après un début de saison où il n'a jamais rien montré de rassurant en altitude. Gérardmer nous a offert un premier test significatif, car une première hiérarchie des forces s'est faite. Et incontestablement, Nibali et Contador sont au dessus des autres. Les autres qui sont-ils ?

 

Revue d'effectif

(Dans l'ordre d'arrivée de cette huitième étape)

- Richie Porte répond présent ! L'Australien du Team Sky, ne suit Vincenzo Nibali qu'à seulement 4'' (et donc 7'' de Contador). Une belle performance pour un coureur dont on ne savait pas trop à quoi s'attendre. Il était le bras droit de Christopher Froome, avec David Lopez Garcia, ils formaient la garde rapprochée du vainqueur sortant, partageant les mêmes sessions d'entraînement en altitude. Mais au Dauphiné Porte inquiétait, après une première moitié de saison où il a été inexistant (excepté une deuxième place sur la Ruta del Sol). En début de Tour, on ne l'a pas vu beaucoup plus rassurant. Projeté leader, l'Australien a-t-il retrouvé ses jambes ? Il est en tout cas le mieux classé des adversaires de Nibali actuellement, après une avoir bien géré l'étape des pavés où il a été pourtant malchanceux. Troisième au classement général à 1'58'' de Vincenzo Nibali.

- Les Français Thibaut Pinot et Jean-Christophe Péraud n'ont fini qu'à 8'' de Vincenzo Nibali. Pas mal ! Ils ont beaucoup attendu la montagne, n'étant pas les plus à l'aise dans une première semaine nerveuse de Tour de France. Tout comme pour Richie Porte et Vincenzo Nibali, leurs préparations pour le Tour de France n'avaient pas été flamboyantes. Péraud, malgré une bonne dernière étape, était passé à côté du Dauphiné. Quant à Thibaut Pinot, après un bon début de Tour de Suisse, il s'est écroulé dans les deux étapes de montagne de Verbier et Saas Fee. Les problèmes de l'un et l'autre est qu'ils ont perdu du temps en première semaine. Pinot est actuellement douzième du classement général à 3'32'' et « JCP » quatorzième à 3'37''. S'ils veulent prétendre un bon classement général, il va donc leur falloir maintenir le même rythme quand la haute montagne viendra. Les deux ont l'avantage de bien se débrouiller en contre-la-montre. Thibaut Pinot y a, en effet, fait des progrès. Comme il l'aime à le souligner, trois top10 en chrono' sur trois épreuves World Tour (le Tour du Pays Basque, le Tour de Romandie et le Tour de Suisse). Mais à Périgueux l'avant dernier jour, il y aura plus de 30 kilomètres de plus que dans ces trois chrono'…

- Alejandro Valverde… C'est la sensation ! On a vu Nibali tenir tête aux attaques de Contador, présenté comme le meilleur grimpeur des deux... Mais on s'attendait aussi à savoir si Alejandro Valverde pourrait se mêler à la bataille. Ce ne sont que les premières montagnes et elles ne sont pas comme les Alpes ou les Pyrénées, où les différences risquent d'être plus importantes, alors que les pourcentages moins forts. Mais quand même. Valverde a perdu 16'' sur Nibali et 19'' sur Contador. Il arrive derrière Pinot et Péraud. On ne voit pas là quelqu'un en mesure de jouer la victoire finale de ce Tour de France. D'autant plus que, comme Contador, il a le handicap de ces plus de deux minutes perdues sur les pavés sur Nibali. Valverde ne peut compter que sur la montagne pour reprendre tout ce temps au maillot jaune. Et sur la première montagne, il s'est fait distancé… L'Espagnol n'a pourtant pas spécialement la réputation de louper son premier rendez-vous montagneux, comme certains coureurs qui ont besoin de monter en puissance. Il est désormais cinquième du général à 2'27'. Inquiétant ?

- Tejay Van Garderen : on n'a jamais revu l'Américain de la BMC au niveau de son Tour de France 2012, qu'il avait terminé cinquième. Malchanceux en ce début de Tour de France, il est relayé à 3'34'' au classement général, treizième. Mais sur ce premier test montagneux, il ne perd que 20'' sur Nibali. Ce n'est pas mal, mais pour l'Américain, quelles vont-être les possibilités ? Il est trop près au classement général pour qu'on lui laisse sa chance sur une étape, et on ne l'imagine pas en mesure de contrer les leaders. A moins de faire un coup à la Talansky sur le Dauphiné (on l'imagine quand même assez mal), l'Américain peut difficilement espérer mieux qu'un nouveau top 5. Encore une fois, à condition qu'il soit au même niveau en haute montagne…

- Romain Bardet : il a vécu une première semaine sans trop d'encombres et arrive maintenant dans un terrain qu'il affectionne plus. Il arrive à Gérardmer 28'' derrière Nibali, ce qui lui permet d'être actuellement septième du général à 2'39''. Le Français vise plus le général. Quinzième l'an passé pour son premier Tour, il est en bonne position pour grimper d'un rang.

- Bauke Mollema : Le Néerlandais ne répond pas présent comme on l'attendait. Le troisième du dernier Tour de Suisse avait impressionné sur le Tour 2013 avant que son rythme ne soit ralenti par une grippe. Il avait quand même terminé sixième. Cette année, il était l'un de ceux qui pouvaient créer la surprise. Ça semble mal parti ! 35'' derrière Nibali à l'arrivée, c'est beaucoup sur si peu d'ascension. Et c'est pourtant normalement son terrain. Le voilà désormais neuvième du général à 3'02''. Malheureusement pour lui, ce que l'on en a vu ne nous permet pas pour l'instant d'envisager un podium pour lui. A moins qu'il ne se réveille en haute montagne.

- Rui Alberto Faria da Costa : Le Champion du Monde est discret, fidèle à lui même. On ne sait pas ce dont il est capable en montagne, dans une position de leader. L'an passé, équipier de Valverde, il avait du se relever pour attendre ce dernier sur les coups de bordure de Saint-Amand-Montrond. Bénéficiant de son retard au général, il s'en allait chercher deux belles victoires d'étapes ensuite. Cette année, il vient avec d'autres ambitions. N'ayant jamais fait mieux que dix-huitième au général, en 2012, on attend encore de voir ce dont le triple vainqueur du Tour de Suisse est capable.

 

Voilà donc dix leaders qui correspondent plutôt bien au tableau des favoris qu'on pouvait dresser au départ du Tour (en y éjectant Froome après son abandon). Il y a quand même deux absents. Deux autres malchanceux. Jurgen Van Den Broeck et Andrew Talansky menaient une excellente course sur l'étape des pavés mercredi avant d'aller, en même temps, au tapis dans la chute provoquée par Lars Ytting Bak. Ils n'ont pas été plus chanceux par la suite, chutant tous les deux dans le final de Nancy, hier. VDB perd 1'17'' sur Nibali aujourd'hui et se retrouve dixième du général à 3'02''. Quant à Talansky, de nouveau victime d'une chute aujourd'hui, le dernier vainqueur du Dauphiné est désormais seizième du général à 4'22''. Dur !

Et puis une autre énigme, c'est Michal Kwiatkowski. Inquiétant sur le Dauphiné, il a toujours réussi à sauver les meubles en ce début de Tour de France, alors qu'il s'est retrouvé piégé plus d'une fois en cours d'étape sur cette première semaine. Perdant 1'36'' aujourd'hui, distancé dans la première ascension, il parvient quand même à se maintenir quatrième du général à 2'26'' du maillot jaune. Pour combien de temps ?

 

La faille de Nibali ? 

Mais la principale indication du jour vient peut-être d'autre part… L'équipe Astana, impressionnante sur le papier a failli. Certes, ça n'a pas prêté à conséquence, mais Jakob Fuglsang et Tanel Kangert ont été distancés assez tôt… Et ce on n'est pas dans la haute montagne encore. A l'inverse, l'équipe de Contador, qu'on jugeait faible jusqu'ici a bien répondu présente. Après ce premier rendez-vous, la hiérarchie des forces n'est donc pas encore établie… Mais l'avance de Nibali lui donne quand même déjà une longueur d'avance.

 

Propos recueillis par Antoine PLOUVIN et Emmanuel POTIRON