ITW/Le Mag - Ladagnous : «Ce mercato, un tournant pour Groupama-FDJ»

Par Titouan LABOURIE le 15/12/2023 à 19:35. Mis à jour le 19/12/2023 à 13:21.
ITW/Le Mag
Photo : @Cyclismactu

Le 2 octobre dernier, Matthieu Ladagnous mettait un terme à sa carrière. Après 18 ans de bons et loyaux services, le Palois a tiré sa révérence. 18 années qu'il aura toutes effectuées au sein de Groupama-FDJ, fidèle à son patron Marc Madiot et à son leader Thibaut Pinot. Au cours de sa carrière, Ladagnous aura participé à 14 Grands Tours, dont 8 Tour de France et a également été chercher 11 victoires. Désormais jeune retraité, le capitaine de route nous a acceuilli chez lui, dans le Béarn, et est revenu sur ses 18 années en tant que cycliste professionnel au micro de Cyclism'Actu.

Vidéo - Matthieu Ladagnous à notre micro en cette fin d'année

 

"Je n'avais pas envie de finir ma carrière en étant écoeuré du vélo"

Bonjour Matthieu, on vous avez quitté début octobre sur la Coppa Bernocchi, donc comment ça va et qu’est ce qu’il s’est passé depuis ?

Ça va bien. Ça fait un petit peu plus de deux mois que je suis retraité. Pour l'instant j'essaye de profiter, de faire des choses que je n'ai pas faites durant ma carrière, où il faut faire plus attention. Donc je profite et je prépare ma reconversion tout doucement.

 

Comment est-ce que vous avez vécu votre dernière année en tant que professionnel ?

J'ai eu la chance de pouvoir programmer ma sortie, je savais de longue date que c'était ma dernière année chez les professionnels. J'ai essayé de faire en sorte que ce soit une saison normale, c'est ce qu'il s'est passé, donc j'en suis content. J'ai pris du plaisir, c'est le principal. Je n'avais pas envie de finir ma carrière en étant écoeuré du vélo.

 

Comment et quand est-ce que vous avez pris la décision d’arrêter ?

J'ai pris la décision il y a un peu plus de deux ans. J'ai ma famille, avec deux enfants, dont l'un qui va faire 15 ans l'année prochaine. J'ai envie de le voir grandir. 18 ans en pro, c'est déjà une belle carrière et rester un peu à la maison avec les enfants, c'est ce qu'il y a de plus important.

 

 

"On est passé d'une petite équipe à une équipe énorme"

A l’arrivée de votre dernière course, quel sentiment prédominait ? C’était de la tristesse ? De la joie ? Du soulagement ?

Déjà, ma dernière course je ne l'ai pas terminée, c'était une course dure. Mais je me suis senti presque libéré, parce que c'est un poids d'être cycliste professionnel, tu penses 24h/24 à ton sport. En plus, à vélo, on prend des risques. J'avais aussi peur de tomber et de me faire mal sur mes dernières courses.

 

Vous avez commencé en 2006, chez la Française des Jeux. Depuis, vous avez fait 18 saisons en pro, où vous avez participé à 14 Grands Tours, dont 8 Tour de France. Vous avez également été chercher 11 victoires. Parmi elles, on peut compter les 4 Jours de Dunkerque, les Boucles de l’Aulne ou encore La Poly Normande. Si vous devriez en retenir qu’une seule course, laquelle ça serait ?

Paris-Roubaix ! C'est la course que j'ai adorée, ma préférée. J'ai eu des bons comme des mauvais moments. C'est la seule classique où je n'ai jamais fait top 10, pourtant c'était ma préférée. Il y a une année où j'étais en passe de faire un podium, mais j'ai crevé à 10 kilomètres de l'arrivée.

 

Au long de votre carrière, vous avez connu plusieurs époques du cyclisme, comment est-ce que le cyclisme a évolué en 20 ans ?

Il y a eu beaucoup de changements. Si je regarde mon équipe, quand je suis arrivé on était une petite vingtaine de coureurs, alors que maintenant on est 30, plus ceux de la Continentale. Il devait y avoir 40 employés, maitenant il y en a plus de 100. Ça a changé à tous les niveaux, tous les ans il y a des nouveaux métiers qui arrivent dans le vélo. Ça évolue, on est passé d'une petite équipe à une équipe énorme. Et c'est pareil pour les autres formations.

 

 

"Marc Madiot est comme un père pour les coureurs"

Votre rôle a lui aussi évolué, vous êtes passé de sprinteurs / classicman à être dans la deuxième partie de votre carrière un véritable capitaine de route. Expliquez-nous ce changement.

Mes premières années pro, je faisais de la piste, j'ai notamment fait les Jeux Olympiques. Ensuite j'ai aimé les Classiques, avec le Tour des Flandres, Paris-Roubaix... Et au bout de 10-12 ans j'en avait marre de faire tout le temps les mêmes courses, les mêmes entraînements... Donc j'avais envie de changer et j'ai demandé à l'équipe de pouvoir accompagner un petit peu plus les coureurs de Grands Tours. C'est ce que j'ai fait progressivement avec Thibaut (Pinot) et après j'ai complètement changé de "métier". J'ai laissé tomber les Classiques et je suis parti sur ces courses-là. Je ne regrette pas ce changement, je pense que c'est aussi pour ça que j'ai fait une longue carrière.

 

Il y a bien sûr quelque chose qui est marquant quand on regarde votre carrière, c’est que vous êtes resté au sein de la même équipe. En 2023 vous étiez d’ailleurs le 2e coureur le plus fidèle du peloton, derrière Imanol Erviti qui faisait sa 19e saison avec Movistar. Pourquoi ce choix d’être resté chez Groupama-FDJ ?

Parce que j'étais bien. Je faisais confiance à l'équipe et l'équipe me faisait confiance. Donc pourquoi aller voir ailleurs quand tu es bien quelque part ? Peut-être que ça aurait été bien de partir au bout de 10 ans, quand la routine s'installait, mais j'ai toujours fait le choix de rester. Je suis assez famille et l'équipe c'est une famille. Marc Madiot dit souvent que l'on n'est pas une équipe comme les autres et c'est vrai. Marc est comme un père pour les coureurs, on n'est pas des pions pour lui. Les renouvellements de contrat se sont toujours fait assez tôt. J'ai eu des contacts avec d'autres équipes, mais ça a été tellement vite à chaque fois avec Marc que je n'ai jamais voulu partir.

 

En France, on a l’impression qu’on est un peu renfermé sur nous-même, il y a peu de coureurs qui vont voir ce qu’il se passe à l’étranger, alors que c’est souvent une réussite, comme on l’a vu avec Julian Alaphilippe ou Christophe Laporte. Comment ça se fait selon vous ?

Je crois que ça commence à changer. De plus en plus de coureurs français partent dans les équipes étrangères. Mais c'est vrai qu'on est assez casanier, on aime bien rester dans notre routine. Et on a une chance en France, c'est qu'on a beaucoup d'équipes en WorldTour.

 

 

"Quand Thibaut Pinot gagne au Tourmalet..."

Quelle était votre relation avec Marc Madiot ?

Avec Marc on a toujours eu une relation saine. C'est facile de discuter avec lui, il ne parle pas beaucoup, mais avec moi ça s'est toujours bien passé. Quand il a des choses à dire, il le dit, quand c'est bien ou quand ce n'est pas bien. Ça s'est toujours passé simplement et c'est ça qui m'a aussi donné envie de rester avec lui. On s'est toujours fait confiance. Et c'est encore le cas, alors que je suis en fin de contrat, j'étais dans l'équipe pour la soirée des supporters, avec Thibaut. Ça prouve qu'on est bien dans l'équipe et j'espère continuer à aller les voir de temps en temps.'

 

Un coureur qui a été marquant dans votre carrière, c’est bien évidemment Thibaut Pinot. Vous avez tout connu avec lui, des moment très forts, comme lors de sa victoire sur le Tour de Lombardie 2018 ou lors de son podium sur le Tour de France 2014. Mais aussi des moments très durs. Quelle était votre relation avec lui ?

C'est quelqu'un qui est humain. Il a besoin d'avoir autour de lui des gens qu'il aime. Il ne cherchait pas à avoir les plus fort avec lui, il voulait une équipe familiale. Il a des objectifs, mais il ne reste pas focus tout le temps dessus. Avec Thibaut ça s'est toujours bien passé, on a connu de très bons moments... et des très mauvais moments. Mais ça fait partie du sport. Et c'est également ça qui a fait aimé Thibaut au grand public, s'il avait été tout le temps bon, je ne suis pas sûr qu'il aurait eu autant de fans. C'est un champion, mais il a tout le temps su rester simple et autour de nous... c'est un ami.

 

On a déjà dû vous poser la question de nombreuses fois, mais ce Tour de France 2019, comment est-ce que vous l’avez vécu de l’intérieur, est ce que vous avez vraiment cru à la victoire finale de Thibaut ?

Oui, forcément. Quand il gagne au Tourmalet... c'était clairement le plus fort dans les Pyrénees. On n'en parlait pas parce qu'on ne voulait pas lui mettre plus de pression, mais on pensait qu'on était en passe de gagner le Tour. C'était le plus fort, mais il a eu un problème.

 

"C'est un gros tournant pour l'équipe"

Cette année, il y a vraiment une page qui s’est tournée chez Groupama-FDJ, c’est un peu la fin d’une ère, avec votre départ, celui de Thibaut, d’Arnaud Démare...

C'est vrai que c'est un gros tournant pour l'équipe, qui change de têtes d'affiche. Mais ces dernières années on a su faire progresser nos jeunes. C'est comme ça, il faut évoluer.

 

Comme nous l’a dit Marc Madiot, c’est la fin de l’ère Pinot-Démare, et maintenant on passe dans l’ère David Gaudu - Valentin Madouas, qui rentrent dans la force de l’âge, est-ce qu’ils peuvent accomplir autant que votre génération ?

Oui. Et ils ne sont pas seuls, il y a aussi Lenny Martinez, Romain Grégoire... Beaucoup de jeunes ont un gros talent. Je leur souhaite d'avoir la même carrière que Thibaut. Ça sera difficile pour eux d'avoir la même notoriété, mais j'espère qu'ils auront au moins le même palmarès que lui.

 

Il y a aussi les petits jeunes Romain Grégoire, Lenny Martinez, Paul Penhoët… qui viennent tout juste d’arriver. Vous avez pu courir avec eux cette année, est-ce qu’ils vous ont impressionné et jusqu’où peuvent-ils aller ?

Tous les jeunes qui arrivent, et dans toutes les équipes, m'impressionnent. C'est des mecs qui sont capables de gagner en WorldTour, dès leurs premières années. Dès 2024 ils ont le potentiel de gagner sur des Grands Tours. Je ne pense pas qu'ils feront des carrières aussi longues que nous, mais ils gagnent des courses d'emblée. Il me semble que certains ne sont pas assez matures mentalement, ce qui est normal à leur âge, mais d'autres comme Romain Grégoire sont déjà prêts.

 

"J'aimerais être pompier professionnel, ce qui était un rêve de gamin"

Vous êtes maintenant à la retraite sportive, expliquez-nous ce que vous faites.

Je profite, le 12 décembre c'était mon anniversaire et c'était la première fois en 19 ans que j'étais chez moi, d'habitude je suis tout le temps en stage. J'ai aussi passé le permis super-lourds et je vais passé celui pour les transports en commun prochainement. J'aimerais être pompier professionnel, ce qui était un rêve de gamin.

 

Il y a-t-il d’autres projets en dehors de celui-là ? Et est ce qu’on peut s’attendre à vous revoir dans le monde du vélo ? Pourquoi pas comme directeur sportif chez Groupama-FDJ ?

Non, si j'ai arrêté ma carrière c'est pour être un petit peu plus avec ma famille. Mais quand tu travailles dans une équipe tu passes encore plus de temps loin de chez toi que quand tu es coureur. Peut-être que je passerais de temps en temps faire des piges, pour garder un pied dans le milieu, parce que c'est ma passion et cette équipe c'est ma famille.

 

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