Mag - Le Football devant le Cyclisme et le Tennis ?

Par Yohann TRITZ le 19/06/2014 à 13:03

Photo : @TV5mondesports

 

Vidéo - TDF - Parcours 2014 en 3D

C’est un secret de polichinelle. Le football est le sport le plus populaire au monde. Loin devant le tennis ou le cyclisme. Des millions de téléspectateurs seront une nouvelle fois amassés devant leur télé pour regarder la Coupe du Monde au Brésil. Mais comment en est-on arrivé là ? Loïc Ravenel, collaborateur scientifique au CIES (Centre International d’Etude du Sport) fait un constat sociologique et historique de ce phénomène. Géographe de profession, il s’est, depuis longtemps, intéressé au sujet de passion des foules. Petite analyse et ce, en pleine Coupe du Monde au Brésil et avant que ne commencent Wimbledon et le Tour de France.

 

Une explication de par l'histoire

 

imageLe football, le tennis et le cyclisme sont nés à peu près à la même époque. A la fin du XIXème siècle. Plus de 100 ans après, ils ont tous suivi des courbes distinctes. Aujourd’hui, le premier nommé possède plus de 30 millions de licenciés, le second 10 millions et le dernier seulement autour d’un million. Toutes formes confondues (Route, Piste ou Cross). Des chiffres édifiants qui s’expliquent par un fait historique. La puissance, à l’époque, de l’empire britannique et sa présence aux quatre coins du globe. Des Etats-Unis à l’Australie, en passant par l’Afrique du Sud. Une domination mondiale qui a fondamentalement compté dans la popularité mondiale du ballon rond aujourd’hui, comme l’explique Loïc Ravenel « L’impérialisme britannique a été à l’origine de sa diffusion au début du XXème siècle. Il dominait le monde et l’a apporté dans ses bagages. Il n’y avait pas d’autres concurrences que ce sport dans les pays colonisés. Les jeux traditionnels se sont esquivés et ont fait place au football ». Oui mais, au moment du monopole mondial anglais, le tennis et le cyclisme existaient déjà. Le chercheur au CIES a une explication toute faite. « Le football était un sport adaptable et adoptable pour tous. Il suffisait d’un ballon, d’une balle ou toutes autres choses pour y jouer. C’était le seul jeu assez transposable par rapport au tennis ou au cyclisme ». Trop encombrant, le vélo ou les raquettes de tennis ne figuraient pas sur la liste à emporter lors des voyages. Au contraire du ballon rond qui a bénéficié de cet avantage pour se démocratiser.

 

Sport collectif contre sport individuel

 

imageAutre atout majeur, le symbole du collectif. Contrairement à ses homologues, le football est le seul à promouvoir l’esprit de groupe et la cohésion prônés par les Etats au milieu du XXème siècle. Un avantage qui a permis au ballon rond de se développer plus rapidement « le sport collectif représentait, à l’époque, l’identification nationale et de jeux entre les nations. » A l’instar des Jeux Olympiques, la Coupe du Monde qui fait son apparition en 1930, sert aussi de vitrine pour les pays. Les compétitions d’enjeux planétaires bénéficient du soutien direct des Etats, qui en profitent pour montrer le pays. « Et on le voit à travers l’organisation des compétitions. Obtenir la Coupe du Monde dans son pays est largement mieux que d’organiser le championnat du monde de cyclisme par exemple » argumente Loic RavenelLa domination de l’équipe nationale devient alors synonyme de puissance. « De l’autre côté, on a des sports plutôt individuels qui n’a pas cette même d’identification, cette métaphore, de la nation ». Et qui ne profitent donc pas autant du soutien inconditionnel des Etats, mais aussi de la population.

 

Le tennis et le cyclisme se heurtent à des complications

 

imageMais d’autres arguments peuvent entrer en ligne de compte pour expliquer cet écart conséquentPour le tennis, elle est d’origine sociale. Car la discipline était d’abord réservée à l’aristocratie et aux élites sociales. Pendant des années, elle était inaccessible à la pratique pour les populations moins aisées. Et ce qui freine encore son développement aujourd’hui selon Loïc Ravenel « Le tennis pendant très longtemps, et continue de l’être, est un sport des classes privilégiées, de l’élite et de distinctions sociales. Il coûte plus cher que les autres. Car il faut un court de tennis, des équipements particuliers. Il y a donc une diffusion moindre par ce côté élitiste ».

Le cyclisme n’a pas eu ce souci. Sport populaire et ouvrier, il pâtit plutôt du manque d’équipement mais aussi de la fonction première du vélo : le transport. « Le contexte social est cette fois-là en adéquation avec le football. C’est pour cela qu’au début du XXème siècle, les courses de vélos ont un très fort succès. Les medias se créent même autour, il y a un réel engouement. Mais il va se heurter à trois problèmes : la première, c’est la bicyclette. Seuls les pays industrialisés y ont accès. Donc il y a difficulté de diffusion par ce principe. La seconde, c’est la différence d’utilisation. En Asie c’est un moyen de transport. Il n’y a pas cette notion de sport qui nécessite d’autant plus un certain coût. Car c’est le troisième problème, les équipements, comme les vélodromes. Même si il y en a pleins qui se créent en France,  la plupart a disparu pour faire place à des stades (Parc Lescure à Bordeaux, Parc des Princes à Paris, le stade Vélodrome de Marseille….). Ils ne se développaient que dans les milieux urbains. Donc très peu d’émergence dans les milieux défavorisés contrairement au football. Et c’est là, la clé du succès. On pourrait aussi rajouter un problème culturel. Car les pratiquants ne savaient pas à qui s’identifier. Ils montaient sur le vélo et ils se disaient "Pourquoi je roule ? Qui sont mes héros ?". Pas sûr que ça ferait plaisir aux champions de l’époque.

Car l’identification à une célébrité est importante pour la popularité du sport. Et cela a fonctionné pour le tennis, qui a joui du succès du célèbre chanteur mais avant tout tennisman, Yannick Noah. « L’effet Noah est en congruence avec le développement du tennis dans les années 80. La fédération en a profité pour se développer en créant des courts, des clubs. Mais maintenant la pratique stagne et des courts de tennis ferment. Cet effet de mode ne se traduit qu’à court terme et ne perdure pas dans le temps.» Et depuis, on lui cherche toujours un successeur…

 

Le football, à jamais au sommet ?

 

image« Le football a un avantage par rapport aux autres sports, c’est sa capacité à attirer les non-amateurs. Tout le monde regarde la Coupe du Monde, notamment pour l’identification à son pays. Il y a dans ces évènements, tous les ingrédients pour créer un spectacle qui plait à tout le monde. Le tennis et le cyclisme restent réservés aux amateurs ». Une démocratisation qui se reflète aussi en termes de médiatisation et du nombre d’évènements. Qui, selon Loïc Ravenel, est un facteur flagrant de l’écart médiatique. « S’il y a beaucoup de football à la télévision, c’est parce qu’il y en a tous les jours, et 24 heures sur 24. Alors qu'au tennis, il n'y a pas cette continuité du haut niveau. Tandis que pour le cyclisme les courses sont cantonnées aux saisons chaudes, de février à novembre. Entre, il y a un trou. Même si l’émergence du sport dans les continents africains et asiatiques tend à satisfaire cette demande ». Le football a un coup d’avance partout. Les magazines, les chaines sportives qui lui consacrent la majorité du temps d’antenne, et les retransmissions de matchs, se multiplient. Jusqu’à éclipser les autres sports à certaines périodes de l’année. «Lorsque l’Equipe de France est championne du monde en 1998, personne ne savait qu’il y avait le Tour de France en même temps. Et ce, malgré les affaires de dopage. » Les larmes de Richard Virenque n’ont pas réussi à écarter le doublé de Zinedine Zidane lors de la finale à domicile face au Brésil. 

Et la tendance n’est pas prête de s’inverser. Même un bouleversement planétaire ne fera pas perdre la crédibilité du ballon rond aux yeux de tous. « Si jamais on apprenait que la finale de la Coupe du Monde était achetée par un milliardaire venu de Hong-Kong et que tous les matchs étaient truqués, je doute même que là aussi, il y ait un retournement de situation. Les limites sont dépassées à chaque fois. Regardez l’affaire Festina dans le cyclisme ou celle d’Armstrong. On croyait que le vélo était mort. Et aujourd’hui, il y a toujours plus de monde derrière l’écran pendant le Tour de France. L’amour du sport dépasse tout ».

 

Roland-Garros et le Tour de France, les exceptions

 

imageMais dans ce monde acquis à la cause du football, il reste deux évènements irréductibles qui résistent encore et toujours à l’envahisseur. Roland-Garros et le Tour de France. Le tournoi du grand chelem a été suivi par 22 millions de Français tout au long des deux semaines. Pour la grande boucle, c’est pharaonique. La course cycliste française rassemble 2 milliards de téléspectateurs dans 170 pays et est diffusée sur 75 chaines. Un chiffre monstre confirmé par Loïc Ravenel, qui voit dans le Tour de France, un cas à part. « Chaque été, il y a une véritable passion. Ce n’est pas dû à l’engouement pour la course, mais plutôt à tout ce qui tourne autour ». Car selon une statistique récente, 60% des téléspectateurs français n’accordent pas d’importance au vélo, mais aux paysages et à la découverte de l’hexagone. Incarné par la voix de l’inusable Jean-Paul Ollivier, le tourisme français attire. « On ne retrouve pas cette même passion sur le Tour d’Italie ou d’Espagne. Les gens veulent voir où ils vivent ». On est soulagé, le football n’écrasera pas tout. Il reste encore des « historiques » qui passionnent. Mais d’ici à regarder le tournoi d’Eastbourne ou le Tour de Suisse pendant la Coupe du Monde. Il y a un gouffre. 

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