Dumoulin - «Il faut booster l'attractivité du cyclisme»
Par Alexis ROSE le 07/05/2014 à 12:19
Sur son site internet, Samuel Dumoulin s'est penché sur le sujet des droits télé dans le monde cyclisme. Le Français, qui connaît bien le monde professionnel puisqu'il le côtoie depuis 2002 et ses débuts chez Jean Delatour, se demande pourquoi le cyclisme n'a toujours pas trouvé son modèle économique, alors que les autres sports, comme le football, l'ont plus ou moins trouvé, et ce depuis des années.
"Je constate que le cyclisme n'a pas vraiment trouvé son modèle économique. Tous les autres sports majeurs l'ont trouvé, alors ça me rend assez soucieux, notamment sur la question des droits télé. Il est évident que le vélo peut toucher beaucoup de monde. Il le fait déjà avec le Tour de France, qui est diffusé dans 190 pays. Pourtant j'ai la sensation que l'on n'arrive pas trop à se servir de cette assise pour se développer. Plus de courses, plus d'équipes, plus de coureurs, plus d'argent… et pourtant il n'y a pas LE modèle solide qui permettrait de s'étendre", explique-t-il.
Le coureur de l'équipe Ag2r La Mondiale, qui estime que la réforme du World Tour, prévue pour 2017, ne prend pas trop en compte ce problème de modèle économique, revient ensuite sur le sujet principal de son message, les droits télé dans le cyclisme : "Aujourd'hui, des acteurs du cyclisme montent au créneau pour qu'il y ait une répartition des droits télé, mais cela ne représente pas une manne financière aussi importante que l'on ne veuille le croire. Le Tour de France se vend bien, les Tours d'Italie et d'Espagne progressent, ayant pour force principale la durée de leur course qui permet de bien négocier les espaces publicitaires, mais la grande majorité des épreuves que l'on voit sur notre écran n'en génèrent aucun profit. Pourtant le cyclisme passe l'après-midi, un moment de la journée souvent en veille à la télévision, avec moins de concurrence que le soir où il y a beaucoup d'évènements, surtout footballistiques. Les diffusions cyclistes font de bons scores, attirent du monde. Ce n'est pourtant pas exploité. Il faut que l'on arrive à booster l'attractivité de notre sport. Le problème étant de rendre les grandes courses plus vendeuses sans que ce soit au détriment des plus petites, et d'éclaircir la vision générale de ce sport qui comporte des courses d'un jour, d'une semaine, de trois semaines...".
Il explique ensuite que ce n'est pas forcément aux coureurs d'attirer les annonceurs, mais plutôt aux instances dirigeantes : "Le coureur n'est pas vraiment responsable du manque d'attractivité de son sport. Comme je le disais plus haut, il se fie tout simplement au système qui a été instauré et se charge de répondre aux attentes de son équipe. Des points World Tour, qu'ils aient été acquis devant les caméras de télévision ou non, en attaquant ou en défendant, c'est pareil pour l'équipe. Si l'on prends l'exemple de Christophe Riblon, vainqueur à l'Alpe d'Huez sur le dernier Tour de France : c'est un succès spectaculaire, qui plait au public, sur la plus grosse étape des trois semaines. Il apporte une visibilité phénoménale au sponsor, gonfle sa notoriété. Mais au final, cette performance, si elle génère une vision médiatique énorme sur la journée, elle ne rapporte pas pour autant davantage de points qu'une 6ème place sur le Grand Prix de Québec. Son résultat va quand même le valoriser grâce à l'image, mais pas à la hauteur de ce que ça a réellement généré ce jour-là, et ce n'est pas la faute de l'équipe : c'est le système qui veut ça".
Selon lui, c'est donc le système qui rend les courses un peu moins intéressante. Samuel Dumoulin propose enfin une idée, émise par Serge Arsenault, pour développer un modèle économique propre au cyclisme professionnel : "Ainsi, on comprend aisément que les coureurs ne se lancent plus dans des grandes chevauchées, n'attaquent plus à cent kilomètres de l'arrivée d'une classique. Alors que c'est ce que le public demande. La planète vélo doit sans doute arrêter de tourner autour d'un enjeu unique que sont les fameux points. Réformer à tout va sur ce terrain n'est à mon sens pas prioritaire d'autant que tout cela n'est pas mis en valeur. L'enjeu, c'est d'arriver à exploiter le potentiel de ce sport, et donc de prendre conscience de cette absence de modèle. Serge Arsenault, l'organisateurs des grands prix de Québec et Montréal, a une bonne idée : trouver des annonceurs qui investissent pour figurer dans la couverture TV de toutes les manches labelisées World Tour. Cela peut être un moyen pour générer un vrai flux, qu'il sera alors intéressant de répartir. Mais encore faut-il ne pas avoir de concurrence avec des sponsors rivaux déjà très implantés, notamment auprès du Tour de France. Encore un frein ? C'est le cyclisme".